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Mur d'atelier : reproductions d'œuvres faisant l'objet de recherches autour de "la tranche" (entre autres : gravures  issues  de traités anatomiques et picturaux, collages de Christian Bonnefoi, peintures en trompe-l'œil de Cornelis Norbertus Gysbrechts et de Samuel van Hoogstraten) 

La tranche - Entre figures du corps et littéralité de l'œuvre, une interrogation sur les limites "anatomiques" dans les pratiques artistiques
 

Recherches réalisées dans le cadre d'un doctorat en Arts et Sciences de l'Art à l'Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles & à l'Université Libre de Bruxelles, sous la direction d'Amélie De Beauffort (ARBA-ESA, dessin), Brigitte d'Hainaut Zvény (ULB, Histoire de l'art) et Thomas Berns (ULB, Philosophie). 

​Ces recherches ont pris leur départ en atelier, dès lors que ma pratique du dessin s'est portée sur "le corps". Ses problématiques se sont d'abord formulées comme ce que l'on pourrait nommer une double insatisfaction ressentie quant à ma pratique artistique :  ni les moyens "figuratifs", ni les moyens "matériels" du dessin ne me semblaient parvenir à montrer avec justesse ce qu’il en était de l’expérience du corps. L’une et l’autre de ces approches me semblaient placer le corps dans une position d’ "objet" : d’un côté la figuration du corps me semblait réduire celui-ci à un objet spéculaire, perçu à distance et renvoyant soit à une identité (qui disait moins le corps, en somme, que "telle personne figurée"), soit à une allégorie ou un symbole, c’est-à-dire renvoyant à autre chose que lui-même et s’apparentant à une fiction ; et, de l’autre côté, l’évocation du corps par le travail direct du support, le traitement des surfaces du papier comme s’il s’agissait d’une peau sans autre contour que celui des bords de la feuille, me semblait réduire la question du corps à celle d’un support matériel inerte, une juxtaposition de ses propres composantes, ne renvoyant qu’à lui-même.

Or, tout l’enjeu me semble être de penser le corps ni d’un côté, ni de l’autre. C’est-à-dire : ni du côté du sujet figuré, ni du côté du support et des composantes littérales de l’œuvre – mais précisément entre les deux. Autrement dit, la question du corps me semblait rendre nécessaire la pensée (et l’investigation artistique) d’un espace intermédiaire entre figure du corps et littéralité de l’œuvre (ou “corps” de l’œuvre). 

Cet espace intermédiaire entre figure du corps et littéralité de l’œuvre, j’ai pris l’habitude de l’appeler la tranche. Le terme fait écho à une opération de tranchement, à un geste plastique ou théorique de coupure qui s’en rapporte au champ lexical de l’anatomie. Il peut désigner la partie d’un objet permettant de trancher, de couper en deux (comme il en va de la tranche d’un couteau) et, en même temps, il désigne un bord mince, l’espace d’une épaisseur venant relier deux plans (comme on le dit de la tranche d’un livre ou d’un tableau, reliant un dessous et un dessus, une face et un dos). La tranche évoque donc à la fois la coupure et la continuité ; elle est tout autant une partie séparée que l’agent d’une liaison.  Elle sépare et unit. 

C'est cet espace ambivalent qui dessine l'objet théorique des recherches. Si la tranche peut d’abord être envisagée comme un espace entre-deux (entre représentation du corps et matérialité), elle induit également un troisième plan de réflexion : celui de la métaphore corporelle associée à la matérialité de l’œuvre – autrement dit, le fait que les composantes et les opérations qui construisent une œuvre puissent, elles aussi, être appréhendées comme des figures du corps (y compris dans le cas d’œuvres non figuratives).

 

Partant de là, deux hypothèses sont formulées au départ de ce travail : d'une part,  que le corps en arts plastiques a été - historiquement et plastiquement - problématisé dans un espace intermédiaire entre "figure" et  "littéralité" ; autrement dit, entre la portée référentielle ou métaphorique d’une œuvre et la dimension littérale de ses composantes et de ses opérations matérielles. D'autre part, elle suppose que le motif du corps tranché, et particulièrement le corps anatomique, a été un lieu privilégié pour problématiser cet espace à travers l’histoire de l’art. 

 

Pour développer ces hypothèses, le travail ne s’articule pas sur des périodes historiques déterminées, ni sur un corpus d’œuvres (au sens d’un ensemble pouvant se justifier historiquement), mais sur différentes opérations et problématiques plastiques. Les œuvres qui sont convoquées dans le travail (sur une période qui va de la Renaissance jusqu'aux pratiques contemporaines) le sont parce qu’elles sont les plus à même de mettre en évidence des manières de problématiser cet espace de la tranche et ce motif du corps tranché, et d'apporter ainsi des éléments de réflexion pour penser le corps dans cette tension entre figure et littéralité, entre corps figuré et "corps " de l’œuvre. Aussi, les principaux aspects sur lesquels se focalisent les 7 chapitres envisagés du travail sont les suivants : l’ouverture et le pli (chap. I), la pâte et la touche (chap. II), l’objet et les opérations (chap. III), le cadre et la coupe (chap. IV) le dépouillement et la décomposition (chap. V), le support et l’épaisseur (chap. VI), la série et la trace (chap. VII). Chacune de ces étapes interroge, différemment et par seuils successifs, le corps dans l’espace de la tranche. 

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